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Qui a tué Tupac Shakur ?

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Qui a tué Tupac Shakur ? Les théories farfelues au sujet de la mort de Tupac ont été éteintes ces dernières années suite aux révélations de Keffie D., leader des South Side Crips de Compton. Nous savons aujourd’hui ce qu’il s’est réellement passé. Contrairement à ce que l’on croit, la rivalité entre les équipes de Death Row et celle du clan Bad Boy de Puff Daddy ne sont pas liées à la signature de Tupac sur le label de la côte ouest : James McDonald aka Mob James est un membre des Mob Piru Bloods de Compton, ami de Suge Knight. C’est lui qui a présenté Suge à tous les autres Mob Piru. Et il confirme que dès les premiers succès du label, Marion « Suge » Knight cherchait déjà à « bolosser » Puff Daddy « comme il le faisait avec tous ceux qu’il croisait » (sic), et cela avant même la signature de Tupac.
 
La signature de Tupac Shakur va en réalité envenimer une situation qui était déjà très chaude. Une rumeur courait selon laquelle Puff Daddy offrait 10.000 dollars pour toute personne qui lui apporterait une chaine Death Row, prise sur un membre du label. Se sentant menacé par Suge, Puff avait déjà commencé à se rapprocher d’un set Crip de Compton : les South Side Crips.
 
Loin d’être un gang aussi réputé et violent que ne l’étaient les « Rollin’ 60 Crips » ou les « 83 Gangster Crips » du fameux Monster Cody, les South Side Crips de Compton étaient tout de même un set avec sa petite réputation. Parmi eux, certains étaient connus pour avoir la gâchette facile et étaient impliqués dans plusieurs meurtres. Parmi ces « hitters » réputés des South Crips figuraient un certain Orlando Anderson aka BG Lane. On y reviendra.
 
Monster Cody des 83 Gangster Crips
 
 
Puff Daddy rencontra donc a plusieurs reprises Keffe D. et les South Side Crips afin d’assurer sa protection lors des déplacements de l’écurie Bad Boy sur la côte ouest, car Puff Daddy avait une peur bleue des gang members autour de Death Row. Suge Knight a grandi dans une famille de classe moyenne de Compton et, en tant qu’étudiant voué à devenir sportif,  ne fréquentait absolument pas les gangs. En revanche, il était ami dans son adolescence avec Mob James et c’est lui qu’il l’a affilié au gang. Pour le coup, il a engagé en tant que gardes du corps une bonne partie des Mob Piru liée à James. Ces Bloods étaient connus pour ne pas rigoler du tout. Leur réputation de violence et la terreur qu’ils imposaient dans le hip-hop des années 90 n’étaient pas feintes : il y avaient parmi eux de vrais tueurs.
Mob James, Timmy Ru, Buntry
Parmi eux, les frères McDonald : Timmy Ru, Mob James et Buntry. Il y avait aussi Aaron « Heron » Palmer, connu pour avoir du sang sur les mains. Tout ce beau monde avait une réputation de vraies terreurs bâtie dans les rues de Compton. C’est cette violence que Suge a « acheté » en incorporant tous ces Mob Piru au sein de la sécurité de Death Row.
 
Ce sont les Timmy Ru, Buntry, Travon, James, Aaron, Poochie, Neckbone etc. qui vont terroriser l’industrie du rap des années 90 pendant que tout le monde faisait une fixation sur Suge Knight.
 
Keffe D. affirme que Puff Daddy aurait été prêt à payer 1 million de dollars pour l’assassinat de Tupac Shakur. Ce que l’on sait c’est que l’escalade de la violence va partir du dépouillage d’un Mob Piru de Death Row, Travon Lane, au Foot Locker du Lakewood Mall. Plusieurs South Side repèrent le Blood et cette chaine Death Row tant convoitée et l’agresse pour lui arracher du cou.
 
Dans la mentalité des gangs, peu importe l’importance de l’agresseur, de son set, de sa réputation, la notion de « retaliation » est dans leur ADN au risque de passer pour des faibles et de ternir leur lustre. Les Mob Piru du clan Death Row se doivent donc de venger cet impair. Si Tupac Shakur est si touché c’est que Travon Lane est celui qui l’a fait entrer au sein du gang des Mob Piru.
 
Les South Side Crips

 
 
Car effectivement, Tupac était un Mob Piru officiel. Son tatouage « MOB » (qu’il présentait comme lié à la devise « Money Over Bitches ») était en réalité un hommage au Mob Piru. Affiliation confirmée par Mob James et son frère Timmy Ru qui ont été interviewés sur le sujet. Si Timmy Ru semblait apprécier Tupac Shakur, son frère James en était très loin. A ses yeux, Tupac était un faux Mob Piru qui n’avait pas trainé dans la rue, qui ne s’était pas fait « jump » (bastonné à plusieurs afin de tester sa résistance aux coups) et qui avait le culot de plastronner avec un tatouage en référence à un gang avec lequel il n’avait versé aucune larme, aucune goutte de sueur. James considère même que Tupac aurait dû rester à sa place lors de cette agression car il dealait avec un type (Orlando) connu pour être un vrai tueur.
 
Las Vegas, le 7 septembre 1996, le combat entre Mike Tyson et Bruce Seldon attire tous les amateurs du noble art dans la ville de tous les péchés. Tout l’entourage de Death Row est présent ce soir là. Ils ne sont pas les seuls : les South Side Crips sont aussi montés sur Vegas et ont loué une Cadillac blanche et un van. Ils sont une dizaine. Orlando « BG Lane » Anderson rejoindra ses amis plus tard, empêché par des affaires personnelles.
 
 
Orlando BG Lane, sa compagne et ses enfants
C’est pour cette raison qu’il se retrouva seul au MGM Casino ce jour de septembre. Travon Lane le reconnait immédiatement et le désigne à son entourage comme étant l’auteur de l’agression qu’il a subie au Foot Locker. Immédiatement, ses amis se ruent sur Orlando. Tupac est le meneur de l’assaut. D’après le témoignage de Mob James, c’est Tupac qui donne le premier coup avant que l’entourage de Death Row lynche le Crip en bonne et due forme. Sur les images de la vidéo-surveillance du casino, on voit un homme habillé en Blanc, donné plusieurs coups de pieds à la tête d’Orlando; c’est Buntry, le jeune frère de Mob James.
 
Orlando est protégé par les agents de sécurité du casino pendant que le clan Death Row prend la poudre d’escampette. Plus tard, Orlando retrouvera les autres South Side et leur racontera son lynchage. Le mot « retaliation » revient immédiatement dans l’esprit des South Side qui ne peuvent laisser passer cet assaut contre un des leurs. Seul problème : ils sont à Vegas, sans arme. Plusieurs d’entre eux, les moins aguerris, ne sont pas très chauds pour se venger à Las Vegas. Mais les plus durs du set veulent une vengeance immédiate.
 
 
 
Ce soir-là, Eric « Zip » Martin est présent auprès des Crips. Ce New-Yorkais de Harlem est devenu un entrepeneur important et s’est lié d’amitié avec le clan de Keffie D. C’est lui qui fait la jonction entre Puff Daddy et les South Side Crips. Toujours armé d’un Glock, Zip proposa son arme pour la vengeance. C’est ainsi que les South Side Crips tournèrent dans Las Vegas à la recherche du convoi Death Row. Ils apprennent que Tupac doit faire une apparition dans un club de la ville, le 662. Ils y foncent et attendent une occasion sur le parking de la boite. Tupac et Suge ne sont pas encore arrivés mais plusieurs membres de la sécurité de Death Row sont déjà présents et aperçoivent le van et la Cadillac blanche des South Side Crips. Mob James interviewé sur la question affirmera qu’il a prévenu Suge que les South Side étaient présents et qu’il fallait être prêts à ce qu’il se passe quelque chose.
 
Chez les Crips, la tension est palpable. Keffie D, le leader du set et oncle d’Orlando est d’abord dans le van. Il en sortira très vite pour rejoindre la Cadillac blanche dans laquelle se trouve Orlando, Terrence Brown et  Dre Smith, ne supportant plus les geignements de ceux qui refusent de se venger dans ces conditions. La Cadillac est conduite par T. Brown, Keffie D est à la place du passager et à l’arrière Orlando occupe le siège de droite alors que Dre est assis sur celui de gauche.
 
Positionnement des Crips dans la Cadillac qui a ouvert le feu sur Tupac selon le témoignage de Keffe D
 
           Keffe D.
Les South Side décident de quitter le parking du club par crainte d’avoir été repéré par les flics. C’est en remontant Flamingo Road que les Crips croisent le convoi Death Row avec Tupac debout à travers le toit ouvrant de la BMW conduite par Suge. Des filles scandent son nom selon le témoignage de Keffie D qui affirmera sans aucune ironie qu’il se comportait « comme une star » (sic). La Cadillac blanche fait demi-tour et arrive à hauteur de la voiture de tête du convoi par la droite. Keffie D confirme que le mieux placé pour ouvrir le feu sur Tupac était Dre mais celui-ci, pourtant connu pour ne pas être un tendre, refuse de toucher à l’arme qui lui est tendu. Orlando prend le Glock de Zip, se penche contre Dre et, vitre baissée, ouvre le feu sur la BMW en visant prioritairement Tupac Shakur qui est touché de plusieurs balles.
 
 
 
Suge, Buntry, Travon et Neckbone
 
 
Voilà la véritable histoire de l’assassinat de Tupac Shakur. Il n’y a aucun complot des illumina-thés, ni du FBI ni de la CIA. C’est une banale et imbécile querelle née de la misère sociale et du désir de réussite des désœuvrés de l’American dream qui poussent ces jeunes Noirs à s’entre-tuer pour un respect que leur refuse la société mais qu’ils croient pouvoir obtenir en étant durs. Au retour de Vegas, une réunion des Bloods de Compton (dans LA et sa région les Bloods sont moins nombreux que les Crips) désignera comme cible toute personne portant les couleurs crips et plusieurs South Side Crips seront assassinés en représailles.
 
  • Keffe D., leader des South Side Crips de Compton. Atteint d'un cancer il a décidé de parler considérant qu'il n'avait plus rien à perdre. D'autres disent qu'il a témoigné sur le meurtre de Tupac d'abord et avant tout parce qu'il a été arrêté dans le cadre d'un trafic de PCP.
 
Si les « enquêteurs » du monde entier développent les théories les plus extravagantes pour expliquer l’assassinat de Shakur, la rue de Compton, elle, est au courant de tout. Et elle règle ses comptes à sa manière. Durant les jours suivants la mort de Tupac, plusieurs fusillades ont eu lieu entre les Mob Piru et les South Side Crips faisant plusieurs morts. Pour stopper le cycle des vengeances, la police fera un raid chez les South Side Crips. filmé, on verra lors de cet assaut contre les Crips, Orlando BG Lane menotté…
 

 
Chez les Mob Piru de Death Row c’est encore pire : l’avarice de Suge qui payait son S.O au lance-pierre, a créé des tensions au point où d’autres set Piru qui ont rejoint sa sécurité sont entrés en conflit avec les Mob Piru d’origine.
 
Son astuce était de payer le moins possible ses employés et de faire des cadeaux (voitures, motos) dont il s’empressait de réclamer le retour dès qu’il avait besoin d’argent sous peine de menace, le cas échéant. Il a ainsi arnaqué plusieurs artistes qui n’ont jamais été payés, beaucoup des hommes chargés de sa sécurité touchaient des clopinettes pendant que lui brassait des dizaines de millions de dollars. Le seul qui semblait avoir les poches bien pleines étaient Buntry, devenu le chef de la sécurité de Death Row.
 
Résultat : Buntry, Aaron, Poochie ont été assassinés par des Fruit Town Piru pour venger une tentative d’assassinat sur l’un des leurs ordonnée par Suge : il avait réclamé à G. Williams, un de ses gardes du corps affilié aux Fruit Town Piru, de retourner deux voitures qu’il avait. Sous-payé, Williams aussi connu sous l’alias « G. » n’en avait cure des menaces et a envoyé balader le boss. Sur la photo, George Williams est à droite faisant le signe « P ». Il est soupçonné d’avoir assassiné (lui et ses amis des Fruit Town Piru) plusieurs proches de Suge dont Buntry et Aaron Palmer, deux durs des Mob Piru, pour se venger d’une tentative de meurtre sur sa personne.
 
Big Jake, Buntry, Suge. L’homme debout faisant le « P » de Piru est George « G. »
 
Le premier à tomber est Aaron Palmer et le Compton PD n’en revenait pas : qui en a assez pour oser s’attaquer ainsi au Mob Piru et abattre l’un des plus durs du clan Death Row ? En fait, une guerre interne venait d’éclater au sein de Death row entre les anciens frères d’arme, tous Bloods/Piru de différents sets, rongés par la jalousie de ne pas toucher autant d’argent que l’autre. 
 
Kahm Piankhy novembre 2019
 
 
 

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