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L’exode des athlètes africains vers Bahreïn

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C’est le « Bahraïn Drain ». En deux mots. Comme le Bahreïn, petit état insulaire du Golfe, et en référence aussi au « brain drain », pour dire fuite des cerveaux, en anglais. Sauf qu’il s’agit surtout d’une fuite des athlètes africains, attirés par la promesse de meilleures conditions d’entraînements et la perspective du confort matériel.

« Dans quelques années, le Nigeria ne participera plus aux Jeux olympiques ». Voilà le triste constat que dresse Ventures Africa aux athlètes nigérians, dont beaucoup portent les couleurs rouge et blanc du drapeau bahreïni, aux Jeux Olympiques de Rio.

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« Regardez ici les équipes du comité national olympique de Bahreïn, et ne vous laissez pas avoir par les noms musulmans : la plupart sont nigérians ou d’autres pays africains », s’est insurgé Bambo Akani, le fondateur du blog nigérian Making of Champions dans une interview à Ventures Africa.

Sur une délégation de 35 athlètes, Bahreïn compte aujourd’hui sept Nigérians dans ses rangs. Cette politique de naturalisation massive et rapide, également pratiquée par le Qatar, les Émirats arabes unis, la Turquie, le Danemark ou les États-Unis, a permis à ce petit pays de 1,3 million d’habitants d’empocher une médaille d’or et une autre d’argent, grâce respectivement à Ruth Jebet (3 000 m steeple) et Eunice Kirwa (marathon), deux athlètes nées au Kenya. Avant cette année, le royaume n’avait glané qu’une seule médaille, de bronze, depuis sa première participation aux JO en 1984.

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Le Nigeria, lui, est encore bredouille. C’est le manque de ressources financières et les conditions de vie difficiles qui poussent ses athlètes africains à changer de nationalité et à concourir pour un pays adoptif. « Si nous refusons de nous occuper de nos meilleurs talents, quelqu’un d’autre le fera, dans un royaume très loin d’ici », regrette Bambo Akani.
« A Bahreïn, je peux également aller à l’école »

« Au Kenya, je n’étais pas sûre de pouvoir aller aux jeux Olympiques parce qu’il y a beaucoup de coureurs. A Bahreïn, je peux également aller à l’école », a expliqué Ruth Jebet à l’AFP.

Âgée de 19 ans, la Kényane a offert son titre à Bahreïn. Elle avait quitté son pays natal en 2013 pour aider sa famille en grande difficulté financière.

Comme elle, Precious Moses rêvait de « courir pour son pays ». En 2015, il était encore « le nouvel espoir du 200 et 400 m » au Nigeria, selon Making of Champions. Mais à Rio, il s’appelle désormais Moussa Ali Issa, son nom bahreïni. « Le Nigeria a plus d’athlètes talentueux mais il ne les aide pas assez », a-t-il confié sur le site. A Bahreïn, le comité olympique s’est occupé de tout, jusqu’à changer son nom. « Mais je suis toujours chrétien », précise Precious Moses, devenu un citoyen de Bahreïn en moins d’un an.

After the embarrassment caused by the exposure of their shenanigans by the athletes, a quick about turn by ?? Ogas https://t.co/cgrGdjE01Y
— athleticsafrica (@Athletics Africa)

Au Nigeria, des athlètes ont dénoncé les infrastructures désuètes lors des entraînements, ainsi que le manque de suivi médical après une blessure, rapporte Quartz Africa. Plus récemment, des membres de l’équipe d’athlétisme nigériane ont failli devoir payer eux-mêmes leur billet d’avion pour le Brésil, avant qu’une vive campagne sur les réseaux sociaux ne fasse reculer la décision du comité olympique, embarrassé par l’affaire.
Jemima Jelagat Sumgong et Eunice Jepkirui Kirwa (dossard 452) à l’arrivée de l’épreuve de marathon féminin, le 14 août 2016, à Rio de Janeiro.

Dimanche 14 août, Jemima Sumgong a sonné la revanche de son pays. La marathonienne kényane a devancé, en 2 heures 24 minutes et 4 secondes, sa compatriote passée du côté bahreïni Eunice Kirwa. Les deux athlètes ont franchi la ligne d’arrivée main dans la main.

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